Musona et Gould vont faire trembler V Club jusque dans ses derniers retranchements, en marquant les deux buts de la rencontre, ce jour du 29 Mars 2014 lors du match retour Kaizer Chiefs vs V Club, éliminatoires de la Champions League 2014, à Soccer City aux alentours de Soweto (South West Town –Cité du Sud-Ouest). Les Verts et Noirs vont se qualifier in extremis grâce au hat-trick (triplet) de Firmin Mubele au Stade Tata Raphaël lors de la première manche. Chargé de l’intendance, Tubilandu Ndimbu apprêtait les apparats vestimentaires pour les joueurs en vue d’un entrainement léger au Balfour Park de Johannesburg, le soir du 26 mars 2014. Dans la journée, je me suis, pour la toute première fois de ma vie, entretenu avec Tubi, souriant et réservé, à propos de sa luxuriante carrière au Holiday Inn Hotel du centre commercial d’Eastgate. J’ai réalisé à l’issue de notre tête-à-tête O combien bénéfique et méritoire que devant l’occultation de responsabilités parfois criminelles de la part des autorités sportives locales, l’absence totale de la moindre esquisse de réflexion sur le rôle joué par les footballeurs de renom international à l’instar d’Albert Tubilandu Ndimbu, un sentiment naturel de frustration et d’indignation a déjà obligatoirement vu le jour et se développe de façon latente vers un déboulonnement de l’ensemble du système de gestion de football en RDC; sans un «Hall of Fame » devant lequel le commun des mortels s’inclinerait pour récapituler la luxuriance d’un football congolais qui a tant offert au pays et immortaliser son glorieux passé.
Grandissime et triste nouvelle, Tubilandu, le Grand Niawu nous a quittés, pour toujours le 16 juin 2021. Il est mort! L’un des meilleurs gardiens de son époque dans les années ’70 et ’80, Vieux Tubi fut de la campagne des Léopards à Gelsenkirchen et Dortmund pour l’inédite coupe du monde de 1974, représentant le Zaïre, même s’il aura encaissé 6 buts contre la Yougoslavie en remplacement du titulaire Kazadi du TP Englebert. Il demeure l’un des piliers de l’équipe V Club qui avait gagné la Coupe d’Afrique des Clubs Champions en 1973, devenue la Ligue des Champions Africaine, aux côtés de Kibonge Mafu, Lobilo Boba, Luyeye, Kondi, Ricky Mavuba, Maufranc Mambwene, Garry Ngasebe, Adélar Mayanga Maku, et autres Jean Kembo Uba Kembo Tumba Pouce, Mavuba, Mayanga, Kembo, Ndaye Mutumbula. L’unique trophée continental des Bana Veya.

Tubilandu a gardé les perches en 1981 contre la JET (Jeune Electronique de Tizi-Ouzou – JS Kabylie), en finale de la CACC 1981, finale au cours de laquelle V club prit l’eau de toutes parts en dépit des soubresauts ravageurs, mais magnifiquement infinitésimaux d’un certain Katshimuka. V Club perdit les deux rencontres par 5-0 (4-0, 0-1) face au club dont certains joueurs étaient parmi les membres de l’épine dorsale de l’équipe des Fennecs-Equipe nationale d’Algérie au mondial 1982, en l’occurrence Ali Fergani, Larbes et les deux gardiens Mehdi Cerban et Mourad Amara. Ngoma, Mbuya, Kama Mundweni, Mobwa, Kipulu, Baku, Bobo Bobutaka et Temo composaient le noyau dur de cette génération de la campagne africaine de 1981, Vieux Tubi aussi. Le Grand Chat «Tubilandu» a pris part à deux autres finales inter clubs; en Champions League contre Sétif en 2014 et en Coupe de Confédération-la Coupe de la CAF en 2018 contre Raja de Casablanca. Pas comme joueur mais un membre important du staff technique en qualité d’entraineur des gardiens et chargé de l’intendance respectivement. Malheureusement V club avait mordu la poussière, en perdant à chaque fois ces deux dernières finales, amenuisant ainsi ses chances de renflouer son cabinet à trophées continentaux.
Vieux Tubi avait habitué les fanatiques de V Club ainsi que ceux des Léopards aux pas de ses fantasmagoriques sauts, plongeons- les fameux «zonplons» qui lui valurent le pseudonyme de Grand Niawu (Grand Chat). Les souvenirs ne se filocheront pas tant qu’on garde en mémoire l’après-midi du 31 mars 1985. Ce jour-là, au Stade de la Révolution (devenu Massamba Debbah) de Brazzaville, le Zaïre avec Tubilandu dans les bois, ensanglantaient l’enfer des Diables Rouges du Congo Brazzaville par 2-5. Les nouvelles pages de l’histoire se sont ajoutées aux annales du football. Dès ce jour, toutes les rencontres entre les deux pays sont qualifiées de «Derbies du Pool (Malebo)», même au niveau des clubs. Ce ne sont pas Bolaseke et Ngapy qui s’inscriront en faux contre cette assertivité à l’issue de la rencontre au Stade de la Révolution de Brazzaville aux enjeux multiples en Champions League la même année, qui opposait FC CARA (Club Athlétique Renaissance Aiglons) à l’AS Bilima/Dragons.

Toujours dans son rôle de doublon en équipe nationale lors de l’apogée du football congolais, le grand «Niawu» est également champion d’Afrique avec les Léopards en 1974 en Egypte, un récital continental avec les attaquants Ndaye Mulamba, meilleur buteur de tous les temps en une édition de la CAN avec 9 buts en 6 matchs lors de cette 1974, Emmanuel Kakoko Etepe dit «Dieu de ballon« , Adelard Mayanga Maku dit «Good Year« , Joseph Kibonge, Raoul Kidumu mais aussi les défenseurs Raymond Buanga Tshimenu, Ballon d’Or africain 1973, Lobilo Boba dit «Docta», Jean Mana et Albert Mukombo. Vieux Tubi emporte dans l’au-delà un fait d’arme jamais répété. Cette finale contre la Zambie est la seule rencontre dans l’histoire de la Confédération Africaine de Football-la CAF, qui fut rejouée. Après un match nul 2-2 entre les deux voisins, côté sud de la République du Zaïre, le match a été rejoué 48 heures après, le Zaïre s’impose par 2-0 (Ndaye) remportant ainsi son deuxième sacre continental, et Tubilandu était parmi les heureux ambassadeurs qui soulevèrent la coupe que le pays entier appela Moseka jusqu’à ce jour, nonobstant la nomenclature variée de la RDC. 10 fois champion du Zaïre, Tubilandu a savouré deux Trophées Challenge Papa Kalala (1982 et 1983), 3 Coupes du Zaïre en 1981, 1982 et 1983.
Qui encore pour agrémenter certaines matinées dans le quartier Mai-Ndombe dans la Commune de Matete, le berceau de Albert Tubi où il naquit? Personne! La question mérite d’autant plus d’être posée pour rappeler l’attitude héroïque des footballeurs congolais qui se sont donnés sans rétribution financière proportionnelle à leur dévouement, pour l’honneur de la RDC, rien n’est abondamment dit à propos du rôle que les Léopards de 1968 et 1974 ont joué. Un feu follet comme Bobutaka-Bobo que la mort a précipité dans l’au-delà, n’est connu que de nom ; pire encore avec les Kama, Ndefubule, Tovo, Mobua, Mbala, Yaba, Mangala, Bondali Swing etc… Les raisons de cette répugnance sont négativement multiples. Tubilandu était un enseignant autodidacte qui dispensait gratuitement l’histoire du football congolais, africain et mondial, sans matériels didactiques adéquats, pour avoir lui-même pris part au déroulement de l’histoire du football, telle qu’il l’a vécue et non telle qu’il l’apprise ni entendue. Les conséquences d’une histoire falsifiée tiennent d’abord à l’existence de mémoires partielles et partiales. Elles tiennent aussi à l’absence de réflexion sur des expériences certes traumatisantes, mais à haute vertu pédagogique. L’image des pouvoirs publics congolais et ses rapports au sport en général et au football en particulier, sortirait sans doute traficotée d’une réflexion et d’un débat dont la démocratie elle-même aurait tout à perdre. Comment conjurer le sort de cette tragédie d’absence de mémoire?

Pour nous la RDC qui avons perdu un être si cher, Albert Tubilandu Ndimbu, il est des chagrins bien difficiles à surmonter quand disparait un des nôtres aussi important que Vieux Tubi. Quand la peine se sera un peu atténuée, il restera dans nos cœurs les plus Beaux Souvenirs de son radieux et glorieux séjour sur terre, plein des souvenirs. Ce n’est pas la fin de notre histoire, Grand Niawu! Un matin nous unira dans un nouveau bonheur. Ici ou bien ailleurs, viendront des jours Meilleurs. Tu seras là, vivant dans notre Mémoire. Tu seras dans nos rêves la nuit, le jour et tu nous renforceras la dimension qui manque dorénavant.
C’est par l’encre rédactionnelle de frustration, d’une profonde remise en question que je vocifère ces incongruités de dirigeants d’effacer l’oubli et des supputations qui caractérisent leur intellect. Les grands footballeurs congolais sont nombreux à n’être jamais reconnus par le pays, vivant ou morts. A cette heure les veines des nombreux Bana Ya Changu se vident de leur sang – leur football. La RDC se dépeuple de ses légendes, ces grands ambassadeurs qui l’ont mise sur le piédestal de l’échiquier continental et mondial. Dans une histoire que l’on racontera autrement, les événements ne seront plus les mêmes. Raconter l’histoire de ce football autrement, être racontée par les autres, c’est déjà se mettre sur le chemin de la réconciliation avec les âmes perdues et celles vivantes, pétries d’amour et de haine.
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